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Tristan Coloma | Régisseur général

Quand Gilles m’a proposé de jouer le régisseur, il savait très bien que je ne dirais pas non. Son projet, qu’il a toujours fait louvoyer contre vents et marées, avait convaincu son entourage depuis longtemps. C’est à force de volonté qu’il a fini par éviter tous les écueils de la production d’un film. Et rien que pour ça, je voulais faire partie de l’aventure, ne sachant pas très bien quel rôle, stricto senso, j’aurais sur le pont. Pour me rassurer (et peut-être se rassurer lui-même), Gilles sortit des arguments de poids pour me faire comprendre que

je tiendrais avec facilité ce poste, du fait de ma connaissance des lieux de tournage et de ma gouaille séductrice qui fascine les commerçants, moi qui les déteste.

Le film, comme une grande majorité de courts-métrages, n’ayant pas un budget à rallonge, j’ai orienté le choix de notre hébergement dans un complexe grand luxe du Pays bigouden, avec piscine, bain bouillonnant, terrains de tennis et plage à 500 m, tout ça, bien sûr, en payant notre hôte en poignées de moules. Concernant les repas, j’ai pris contact avec le tissu industriel incontournable de l’agrobusiness breton en la personne de Michel-Edouard Leclerc, avec qui j’ai négocié des tarifs encore moins chers que ceux pratiqués avec les associations caritatives contre la faim. Fallait bien rattraper le coup car lors des repérages, j’avais mis en place un rendez-vous entre le patron du centre commercial local et notre réalisateur, qui était revenu avec un sourire béat de satisfaction car ils avaient conclu un sponsoring important… en volume. Tenez-vous bien : c’est donc avec un engagement sur une palette et demie d’eau de source que Gilles avait signé le deal du siècle. C’est l’équivalent de la consommation de flotte d’une ville sahélienne de 5 000 habitants pendant toute une année !!!

Une fois sur place, pour le tournage, j’aurais à vous écrire ce que l’on raconte à sa grand-mère lorsque l’on part en colo à Dunkerque au mois de décembre, le soleil et les fous rire en plus. On était tous fatigués, mais on a bien travaillé, tout en s’amusant, comme par exemple lorsque l’on est parti à la recherche d’un moyen de transport pour se rendre en un lieu mythique où personne ne va jamais, un lieu qui aiguise les désirs et les rêves d’aventures, un lieu de silence dont on pourrait faire un beau film… Ar-Men.

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